Traditionnellement, le mariage se voulait irrévocable et perpétuel. « Jusqu’à ce que la mort nous sépare », disait-on. Si cela demeure vrai pour certains époux, nul ne peut nier que le mariage est de plus en plus éphémère, renouvelable. Certains en sont préoccupés, d’autres y voient quelque chose de bénéfique quand au moins un des deux époux serait plus heureux en étant séparé de son conjoint, ou encore quand cela est dans l’intérêt des enfants. Quoi qu’il en soit, au-delà des jugements de valeur, la loi doit prévoir une solution lorsqu’il y a échec du mariage : le divorce.
Pour quel motif peut-on demander le divorce?
La Loi sur le divorce, qui est de juridiction fédérale, prévoit que le divorce peut être prononcé pour une des trois raisons suivantes :
- séparation depuis au moins un an;
- adultère;
- cruauté physique ou mentale.
La loi n’autorise donc pas les gens à divorcer pour n’importe quel motif et on favorise, en quelque sorte, le maintien des liens du mariage. On veut que le divorce soit quelque chose de mûri, de réfléchi, d’inévitable, et on ne veut surtout pas que des gens divorcent sur un coup de tête au lendemain d’une dispute, aussi importante soit-elle.
Ceci étant mentionné, en pratique, un époux peut difficilement s’opposer à ce que le divorce soit prononcé en tant que tel, puisque les époux sont réputés vivre séparément dès lors que l’un d’eux a l’intention de vivre ainsi. De plus, l’un des trois motifs susmentionnés devra exister lors du prononcé du jugement de divorce seulement, et la demande en divorce pourra être déposée bien avant, ce qui implique que les discussions concernant les conséquences du divorce pourront débuter très tôt dans le processus de séparation.
Les conséquences du divorce
Le divorce entraîne de nombreuses conséquences; il s’agit d’une réorganisation complète de la famille suite à la rupture. Si les époux sont aussi des parents, il faudra prévoir les modalités de garde des enfants, les contributions financières des parents à leur égard, la communication, la prise de décision, l’échange d’information, etc. Dans tous les cas, il faudra procéder au partage des biens et des dettes du couple. Enfin, il peut y avoir certains cas où l’un des époux peut prétendre à une pension alimentaire pour lui-même, une somme globale ou une prestation compensatoire.
Les enfants
La tâche la plus compliquée relativement aux enfants sera d’établir les modalités de garde s’il y a désaccord. En théorie, c’est simple : c’est l’intérêt des enfants qui est visé. Toutefois, il s’agit parfois d’un exercice difficile en pratique, parce qu’il faut tenir compte d’un nombre infini de facteurs qui varient d’un cas à l’autre. L’intérêt des enfants est aussi une notion passablement subjective, laissée à l’appréciation des parents, des avocats et des juges.
Une fois les modalités de garde établies, la pension alimentaire pour enfants sera fixée conformément aux barèmes légaux, qui laissent peu de place à l’argumentation, sauf exception. Quant au reste, pour tout ce qui touche la communication, la prise de décision, l’échange d’information, le tribunal pourra rendre toute ordonnance qu’il juge appropriée dans les circonstances, le cas échéant.
Le partage des biens et des dettes
Au Québec, les biens et dettes sont classés dans deux catégories : le patrimoine familial et le régime matrimonial. Les règles du patrimoine familial s’imposent à tous les époux qui divorcent au Québec, alors que le régime matrimonial peut être choisi par contrat de mariage ou être régi par une loi étrangère. Quant aux dettes, celles qui sont rattachées à un bien seront partagées suivant les règles applicables au partage de ce bien, alors que les autres entrent dans le régime matrimonial. Dans tous les cas, on ne tient jamais compte des fautes que l’un des époux aurait pu commettre durant le mariage (ex. : adultère, violence conjugale, etc.), sauf dans le cas de faute économique.
Le patrimoine familial
Au tournant des années 1990, le législateur a instauré le patrimoine familial afin d’assurer un minimum d’équité entre les époux suite au divorce. Ainsi, le patrimoine familial assure un partage égal de certains biens, en l’occurrence :
- les résidences utilisées par la famille;
- les meubles contenus dans ces résidences;
- les automobiles utilisées par la famille;
- les REER;
- les fonds de pension;
- les régimes de retraite publics (rentes).
On le voit, ces biens constituent la quasi-totalité de ce que la majorité des couples possèdent. Ce qui sera partagé également, ce sera ce qui aura été accumulé durant le mariage seulement. Les époux pourront récupérer ce qu’ils possédaient avant le mariage. Un ou plusieurs calculs mathématiques, parfois compliqués, devront être faits afin de départager le « vieux gagné » des avoirs accumulés durant le mariage. L’exercice n’a donc rien d’aléatoire : une fois les bons chiffres obtenus, le partage pourra être effectué convenablement sans qu’il soit nécessaire de se disputer! Le juge saisi d’une affaire n’a pas non plus de discrétion à cet égard, il s’agit d’une simple application de la loi. Qui a dit que les juristes ne savaient pas compter?
Par contre, s’il y a faute économique, le tribunal pourrait ordonner un partage inégal. C’est que le mariage impose aux époux de contribuer aux charges du mariage en proportion de leurs facultés respectives. Un manquement à cette obligation entraîne une faute économique. Il ne s’agit pas de punir l’époux qui a eu des problèmes personnels, comme des problèmes de santé, ou encore des problèmes financiers, mais bien de sanctionner une conduite vraiment répréhensible, qui implique de la mauvaise foi. Récemment, la Cour supérieure a jugé qu’un homme qui s’était payé du bon temps avec ses maîtresses, plutôt que de contribuer à l’accroissement du patrimoine familial, avait commis une faute économique, justifiant un partage inégal.
Le régime matrimonial
Tous les biens qui ne tombent pas dans la catégorie du patrimoine familial seront partagés suivant les règles du régime matrimonial applicables. En pratique, cela concerne surtout les entreprises, les immeubles à revenus, les placements et les dettes.
Ici, la loi donne une certaine latitude aux époux : ils peuvent prévoir comment les biens et dettes seront partagés en signant un contrat de mariage devant notaire, que ce soit avant ou pendant le mariage. À défaut, ce seront les règles de la société d’acquêts qui s’appliqueront; ces règles sont similaires aux règles du patrimoine familial en indiquant que, grosso modo, ce qui a été accumulé durant le mariage sera partagé également. Quant aux dettes qui ne sont pas rattachées à un bien en particulier, seules celles encourues pour les besoins de la famille seront partageables.
Pour les époux qui résidaient ailleurs qu’au Québec au moment de leur mariage, ce sera la loi applicable à cet endroit qui déterminera la façon dont leur régime matrimonial sera partagé.
Pension alimentaire pour époux, somme globale et prestation compensatoire
Ces recours sont particuliers et ce ne sont pas tous les époux qui y ont droit. Cela dépend des circonstances propres à chaque affaire. En outre, la pension alimentaire pour époux ne vise pas à égaliser les revenus des ex-conjoints jusqu’à leur décès! Elle vise plutôt à établir un équilibre, lorsqu’il y a une disparité importante entre les revenus ou qu’un des époux a des besoins importants alors que l’autre a la capacité de payer. Le cas classique, c’est quand un des époux est devenu dépendant de l’autre sur une longue période, par exemple l’époux qui met sa carrière en veilleuse pour s’occuper de la maisonnée et des enfants.
La somme globale obéit aux mêmes règles que la pension alimentaire pour époux. Il ne s’agit en fait que d’une somme forfaitaire en remplacement de versements échelonnés.
Quant à la prestation compensatoire, elle vise à compenser un des époux au cas où il y aurait enrichissement injustifié par l’autre, pour quelque raison que ce soit. Par exemple, l’époux qui a travaillé bénévolement pour l’entreprise de l’autre, d’une façon significative, pourrait avoir droit à une prestation compensatoire, surtout si l’entreprise n’est pas partageable suivant les règles du régime matrimonial.
Pour bien vous préparer au divorce
Si votre mariage est un « échec », pour reprendre l’expression consacrée par la loi, vous pouvez faire en sorte que votre divorce soit réussi, en mettant de côté l’aspect émotionnel de la rupture et en suivant les conseils de votre avocat afin de trouver une solution raisonnable dans les circonstances. En réalité, la plupart des divorces peuvent être réglés à l’amiable assez facilement lorsque les parties le désirent et qu’elles sont bien conseillées. Nous vous suggérons d’obtenir une consultation juridique à la première occasion, dès le moindre signe que votre couple se dirige vers une séparation.